Pour replacer ce récit dans le contexte global de la collection, parcourez d’abord notre guide « Les Ô de Lancôme » , avant de consulter la fiche produit officielle d’Ô de Lancôme.
Lorsque la maison Lancôme dévoile Ô de Lancôme en juin 1969, le monde traverse l’âge d’or des eaux hespéridées : le flower power bat son plein, les chemises psychédéliques envahissent les rues, et les citrons italiens trônent déjà dans Eau Sauvage (1966) de Dior. C’est dans cette effervescence que le parfumeur Robert Gonnon, alors chez Firmenich, imagine une formule « bouclier vert » capable de défier la canicule.
1. Robert Gonnon : l’homme derrière le mythe
Un nez à la sensibilité verte
Formé à Grasse, Gonnon s’était déjà illustré avec Justine (1965) et signera plus tard Anaïs Anaïs pour Cacharel. Sa patte ? Des architectures d’agrumes éclatantes structurées par des bois secs.
Le brief Lancôme : créer une vague hespéridée longue tenue
Lancôme veut un parfum unisexe, tonique et abordable, capable de concurrencer les colognes masculines tout en restant chic pour les femmes. Gonnon enrichit le duo citron–bergamote d’un cœur aromatique basilic–romarin, puis lie le tout à un fond mousse de chêne–vétiver pour l’accrochage textile.
2. 1969 : année charnière entre swing sixties et fraîcheur seventies
Le contexte socioculturel
1969, c’est Woodstock, l’alunissage d’Apollo 11 et les jupes trapèze ; les consommatrices recherchent des effluves qui s’accordent à un nouveau mode de vie : plus mobile, plus sportif, moins corseté qu’aux fifties. Ô de Lancôme devient leur « douche portable ».
La campagne “Green Shield”
Le slogan d’origine — « Un bouclier de fraîcheur » — s’accompagne d’affiches où une silhouette féminine surgit d’une brume citronnée. Ces visuels, aujourd’hui objets de collection, apparaissaient dans Vogue Paris et Elle en pleine page.
3. Anatomie olfactive : le manifeste « agrumes + herbes + mousse »
La triade d’agrumes méditerranéens
Citron de Sicile, bergamote de Calabre et mandarine ouvrent la partition dans un éclat zesté. Gonnon accentue la naturalité grâce au petitgrain et à une touche de pamplemousse.
L’accord basilic–romarin
Véritable innovation, cette feuille de basilic « Green Shield » ajoute un côté camphré et presque salé, tandis que le romarin rappelle l’air marin des côtes italiennes.
Le socle chypré modernisé
Oakmoss et vétiver forment une base terreuse qui fixe l’élan d’agrumes ; un filet de santal vient arrondir les angles et assure la transition douce vers la peau.
4. De 1969 à 2025 : pourquoi Ô de Lancôme reste culte ?
Rééditions et collection « Les Ô »
Dès 1988, Lancôme sort Ô Oui!, puis en 2025 un trio bien-être — ÔFF Now, ÔVER THE TOP et Ô Zénith, célébrant l’héritage tout en surfant sur la tendance « mood-boost ».
Un parfum durable avant l’heure
Les huiles essentielles d’agrumes proviennent déjà, en 1969, de vergers méditerranéens certifiés, préfigurant l’engagement actuel du Domaine de la Rose à Grasse, acquis par Lancôme pour maîtriser sa filière botanique.
La vague rétromania
Les réseaux sociaux redécouvrent aujourd’hui les colognes vintage ; TikTok compte plus de 25 millions de vues sous le hashtag #OdeLancomeVintage, preuve que le parfum séduit une nouvelle génération en quête d’authenticité.
5. Conseils de collectionneuse : repérer un flacon d’époque
Le cabochon vert bouteille
Les premiers lots (1969-1973) arborent un bouchon cylindrique vert mousse ; la mention « Parfum Toilette » figure en lettres d’or sous le logo rose. Méfiez-vous des rééditions aux lettres argentées : elles datent de 1992.
Couleur du jus
Un léger jaunissement est normal pour une formule riche en agrumes ; en revanche, un brun foncé indique souvent une oxydation avancée.